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TEXTES ET PRESSE

 

Dossier de Com­mu­ni­ca­tion 2024

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Témoignage “Si j’étais ton miroir…”

Le pro­jet porté par Elodie Lefeb­vre, « Si j’étais ton miroir… », est arrivé dans le ser­vice de
soins pal­li­at­ifs de Givors en octo­bre 2019. De manière instinc­tive, l’idée de met­tre en vie
au tra­vers du corps de l’autre, et au départ de danseurs pro­fes­sion­nels, ce qu’il reste
d’envie, et ce qui fait vie dans cha­cun de nos patients sem­blait une évi­dence dans le
cadre des valeurs revendiquées par le ser­vice en par­ti­c­uli­er, et les soins pal­li­at­ifs en
général. Qu’est-ce qui fait encore vie en nous, dans la mal­adie, la défail­lance d’un corps
que par­fois on ne maîtrise plus ? C’est bien la ques­tion cen­trale des soins pal­li­at­ifs, et
l’axe cen­tral apporté dans la prise en soins de chaque per­son­ne.
La matéri­al­i­sa­tion du mou­ve­ment, faire appa­raître ne serait-ce que la pos­si­bil­ité de ce
mou­ve­ment, émanant du plus pro­fond de l’intime de cha­cun, s’apparente à une stratégie
auda­cieuse intel­lectuelle­ment. Loin de la pre­mière idée, qui aurait été peut-être de
rejeter de principe ce mou­ve­ment par un corps qui ne peut plus l’exercer, le pro­jet a bien
au con­traire fait naître un immense intérêt en chaque patient de l’unité qu’Elodie
Lefeb­vre a pu ren­con­tr­er. Comme une dou­ble image : celle où la per­son­ne se voit
impor­tante puisqu’on lui accorde sa pro­pre impor­tance, mais aus­si celle où ce qu’elle a à
exprimer compte pour les autres et l’extérieur, lui per­me­t­tant alors de renaître au
monde.
Per­son­nelle­ment, je ne pen­sais pas que le pro­jet recevrait un accueil aus­si chaleureux et
unanime de la part de tous les patients ; cela a pour­tant été le cas. Cer­tains ont répon­du :
« Votre propo­si­tion est intéres­sante, vrai­ment. Je vous ai exprimé toutes mes envies,
mais dans le stade actuel de ma mal­adie, je ne souhaite pas aller plus loin… ». Même chez
ces per­son­nes, la propo­si­tion en elle-même du pro­jet a apporté un sen­ti­ment de mieux
être, et de con­sid­éra­tion. Nous avons pu con­stater une trans­for­ma­tion des rela­tions des
patients avec nous autres les soignants, au décours de ces échanges… L’impression d’une
cica­tri­sa­tion dans une image du soi au départ très dégradée.
Plus stupé­fi­ant encore… Par­mi nos patients, cer­tains n’avaient jamais rien livré de leur
intim­ité ni de leurs rêves, ni aux médecins, ni aux soignants, ni aux psy­cho­logues…
par­fois et très sou­vent ni même à leurs proches. L’importance qu’a accordée Elodie à la
per­son­ne et à ses désirs pro­fonds lors des entre­tiens a aidé à ouvrir des portes, que la
per­son­ne ne voulait pas, ou ne se sen­tait pas la force d’ouvrir. Le résul­tat est uni­voque,
tou­jours : « Mer­ci de m’avoir per­mis d’ouvrir cette porte sur moi-même !». D’une idée
qui veut au départ faire vivre l’envie ou le désir de vie en cha­cun de nous, nous arrivons
par ce retour à l’être désir­ant et exp­ri­mant ce désir, à révéler ce qui était jusqu’alors
caché à nous-même, que ce soit de manière volon­taire ou non.
Au delà de la vie qui s’exprime dans ce pro­jet, c’est surtout un témoignage de l’envie et
de l’humanité de cha­cun de nous, qu’on ne perd jamais tant que l’on est vivants, comme
le pro­jet a pu nous le con­firmer. Cela nous rap­pelle, à nous soignants, que l’humain reste
un être de désir, et que la croy­ance en la pos­si­bil­ité de ce désir nour­rit la magie de la vie.
Comme un cri con­tre la résig­na­tion à pour­suiv­re la vie ou son accom­pa­g­ne­ment, « Si
j’étais ton miroir » nous rap­pelle, si c’était néces­saire, que l’accompagnement pal­li­atif est
un accom­pa­g­ne­ment de l’envie qui nous ani­me tous, et que notre tra­vail est de
per­me­t­tre de réu­nir les con­di­tions qui ren­dent cette envie vraisem­blable au min­i­mum,
vis­i­ble et pal­pa­ble dans le meilleur des cas. Ce tra­vail nous rap­proche de ce qui est
essen­tiel lorsqu’on se rap­proche de sa Yin de vie ou de sa mort : la vie et l’envie de vie.
Comme tout pro­jet de créa­tion, « Si j’étais ton miroir » n’est prob­a­ble­ment pas
repro­ductible partout ni par tout le monde, parce qu’il ne peut pas se pass­er d’une
par­tic­i­pa­tion impor­tante d’humanité, de psy­cholo­gie et de finesse d’analyse par sa
con­cep­trice. En cela, ce pro­jet est unique, car porté par une femme qui vit pleine­ment et
avec pas­sion l’idée en laque­lle elle croit. Ce qui est dom­mage, car chaque ser­vice de soins
qui accom­pa­gne des per­son­nes vul­nérables ou frag­ilisées tir­erait un réel béné­fice d’un
tel pro­jet, tant au niveau de ses patients que de ses soignants. La suite logique du pro­jet
Si j’étais ton miroir » sera donc de ren­dre pos­si­ble la démoc­ra­ti­sa­tion de telles
démarch­es, partout en France.

Dr Julien Traut­mann
Chef de ser­vice
Ser­vice de Soins Pal­li­at­ifs
Hôpi­tal de Givors

 

Festival Les Hommes Forts S’Éclatent

https://theatredegivors.fr/wp-content/uploads/2021/05/Festival-HF-plaquette-2021‑L.pdf

 

 

Si j'étais ton miroir